Entretien : «Quand une femme s’engage dans une activité, elle veut prouver», Georgette Paré, actrice du cinéma

Elle est dynamique, battante et une figure connue du monde du cinéma burkinabé. Elle, c’est Georgette Paré. Cette dame à l’expérience cinématographique impressionnante, a fait ses premiers pas dans le cinéma en 1989. Ainée d’une famille de huit enfants, Georgette Paré a fait des études d’attaché de presse à l’école française des attachés de presse. Elle fait de la production et est propriétaire d’une agence de communication (Proximus Média) et d’une régie publicitaire (Casting Sud). À l’honneur dans notre rubrique de la semaine, cette amazone du cinéma burkinabè nous parle de son expérience de femme entrepreneure.

Vous avez été actrice très jeune, quel rôle vous a le plus marqué ?

C’est mon premier rôle, parce que ce rôle reste toujours gravé dans ma tête. N’ayant pas une formation au préalable et le jeu d’acteur. Ça n’a pas été du tout facile, parce que je ne savais pas ce que c’était que d’être actrice. Quand je suis allée faire le casting de mon premier film  » Yelbeedo », on m’avait demandé de pleurer. Ce qui m’a fait rire, et cela a énervé l’équipe de casting. C’est pour dire que mes premiers pas en tant que comédienne, ça a été vraiment inédit. Cela a été une expérience que je ne pourrai jamais oublier.

Comment avez-vous eu la passion du cinéma ?

Le FESPACO a beaucoup contribué à cette passion. En son temps lors de ce festival, les après-midis étaient libres. Avec mes copines, on était toujours pressé de finir les cours et de courir à l’hôtel indépendance pour entre autres monter à cheval dans les rues de Ouaga. La passion est venue de là, mais de là à m’imaginer actrice, ça je ne sais pas comment c’est arrivé. Mais, je ne suis pas allée dans une maison de production pour chercher à interpréter un personnage. J’ai rencontré mon réalisateur par hasard. J’ai fait de l’autostop avec lui et ce dernier s’est avérée être mon premier réalisateur. Il a trouvé que j’avais une tête qui pouvait l’intéresser pour son film. Il a demandé à ce que je passe pour le casting ; voilà c’est comme ça que s’est arrivé. A priori quand il m’a donné son contact en disant de passer à la production, je n’y suis pas allée et je lui ai donné le contact de ma mère qui à l’époque travaillait à la CNSS. C’est ainsi qu’il a appelé ma mère pour lui dire de me dire de passer pour le casting. J’y suis allée et il m’a retenue comme une des principales actrices.

Est ce qu’on peut dire qu’aujourd’hui vous vivez du cinéma ?

Je ne peux pas dire que je vis du cinéma parce que je ne suis pas régulière sur les plateaux de tournage. Je ne joue pas tout le temps. Il peut se passer des années sans que je ne joue. Je n’ai pas consacré spécialement ma vie à être une actrice de cinéma. Peut-être que je vivrais de cela si j’abandonnais mes autres activités.

Mais vous pouvez nous parler de votre concept le celebrity’s days ? Ce que vous réservez aux acteurs du cinéma au FESPACO pour cette année ?

Le concept celebrity’s days est née d’un constat simple. J’ai fait le tour de beaucoup de festivals. J’ai même fait celui de Canne trois fois. Chaque fois, je voyais un peu comment les choses se paissaient. En plus des acteurs de cinéma, le festival mettait un point d’honneur à des célébrités d’autres domaines tels que le sport, la danse, la musique. L’idée m’est venue avec une consœur Aïcha Dabré et Issaka Sawadogo qui est un grand acteur, de créer cet évènement des professionnels du cinéma qui viennent au FESPACO. C’est ainsi qu’on a réalisé la première édition en 2017. On est en train de préparer la 3ème cette année. Il est également à noter que du fait de mes multiples participations au festival, très tôt j’avais créé en 1997 un concept qui était de promouvoir l’acteur africain. J’avais eu un soutien de l’agence de la francophonie qui à l’époque avait financé mes déplacements dans les cinq capitales de l’Afrique de l’Ouest francophone. Aujourd’hui, l’objectif est quasiment atteint. L’innovation que je veux apporter cette année au celebrity’s days, c’est d’associer tout types de célébrités telles que celles de la musique, de la danse, de la mode.

Comment vous analysez l’entrepreneuriat féminin au Burkina aujourd’hui ?

L’entrepreneuriat féminin au Burkina bouge énormément. De plus en plus, on voit les femmes dans des entreprises, à de grands postes, qui prospèrent. Franchement, c’est à notre honneur parce que les femmes que nous sommes, avons toujours des défis si bien que quand on nous confie une tâche ou que l’on s’engage dans une activité, on veut prouver que nous sommes aussi à la hauteur de ce qu’on nous a confié, ou du moins qu’on a aussi des ambitions et qu’on peut les réussir.

Quelles sont les difficultés auxquelles les femmes entrepreneures sont confrontées de nos jours ?

Les femmes ont toujours été confrontées à tout dans leur existence. On a cantonné la femme dès l’aube des temps à une certaine tâche qui fait qu’elle doit juste rester à la maison, faire des enfants et préparer. Aujourd’hui, on se retrouve avec une nouvelle mentalité. Il y a des hommes, en tout cas en majorité, qui veulent des femmes qui en plus des travaux domestiques, mènent d’autres activités génératrices de revenus. Aussi, les femmes sont souvent sous-estimées et c’est ce qui les amène d’ailleurs à aller au-delà d’elles-mêmes et à prouver qu’elles savent bien faire. Aujourd’hui les femmes elles-mêmes bougent et veulent montrer qu’elles peuvent aussi contribuer à l’avenir de la Nation.

Vous avez un coup de cœur ?

C’est toujours du côté de l’entrepreneuriat. C’est d’encourager nos enfants, les jeunes filles d’aujourd’hui à entreprendre et à être intelligentes même si elles sont belles. Parce que la plupart du temps, les femmes sont pratiquement traitées comme des objets de plaisir. Il faut qu’elles soient assez matures dans la tête, qu’elles se fassent respecter et qu’elles montrent qu’elles sont des femmes intelligentes au-delà de leur beauté. Et qu’elles peuvent occuper les mêmes places que les hommes du point de vue professionnel. Car pour moi, l’égalité homme et femme, c’est la chance qu’on peut offrir à un homme et aussi à une femme. À part la force physique qui n’est pas égale, l’homme et la femme sont complémentaires. Chacun à un rôle bien sûr, mais du côté de l’entrepreneuriat ce qu’un homme peut faire, une femme peut le faire, voire plus que les hommes.

Aïcha TRAORE