C’est devenu la mode. Après chaque coup d’État, les putschistes font rédiger une charte de la transition qu’ils annexent à la Constitution. Ce qui leur permet de légaliser et à la limite légitimer leur pouvoir et président qu’on désigne toujours au cours d’une rencontre qu’on qualifie d’assises nationales. D’assises nationales, parlons-en car il s’agit le plus souvent d’un ramassis de personnes issues de ce qu’on appelle « forces vives » qui en vérité ne représentent pas toujours les opinions réelles des Burkinabè.
En 2014, après l’insurrection populaire, face aux calculs des leaders politiciens qui avaient refusé de prendre le pouvoir après la démission précipitée de Blaise Compaoré, on a concocté entre deux murs une Charte de la transition et désigné aux forceps Michel Kafando pour diriger la transition. A moins qu’on ne veuille pas le reconnaitre, Michel Kafando n’a jamais été un président de transition consensuel. La preuve est qu’il a été accusé de travailler pour un camp politique auquel il a transmis le pouvoir à la fin de « son mandat ».
La preuve est qu’effectivement, sa gestion de la transition a été émaillée de plusieurs incidents dont un coup d’État, heureusement ou malheureusement (c’est selon) contesté et refusé par les populations (les mêmes qui l’ont mis là où il était). Félicité à la fin de la transition par les nouveaux arrivés au pouvoir, il passe doucement sa retraite dans sa ferme où on était allé le chercher pour en faire un président. Quant à son Premier ministre Yacouba Isaac Zida qui a eu des intentions de lorgner le pouvoir, il s’est exilé au Canada où il vit avec sans doute, une certaine amertume. Tout simplement parce que ça n’a jamais été son projet.
En janvier 2022, après le coup d’État qui a chassé Roch Marc Christian Kaboré du pouvoir, on est passé pratiquement par le même processus. Une charte de la transition (on y a même ajouté une charte des valeurs que personne n’a jamais respectée) et la désignation ou la confirmation d’un président (le même qui a fait le coup d’Etat). Comme si toute cette comédie ne suffisait pas, on lui a fait prêter serment devant les juges du Conseil constitutionnel puis on lui a porté le collier de Grand maitre des ordres burkinabé, généralement réservé aux présidents élus aux suffrages universels. Quatre organes étaient mis en place pour conduire la transition : le président de la transition, le Conseil d’orientation et de suivi de la transition, le gouvernement et l’Assemblée législative de transition. Huit mois après, tout cela est tombé à l’eau. Et nous voilà, en train de répéter les mêmes faits, pour ne pas dire les mêmes erreurs.
On se rappelle que de nombreux observateurs avaient dénoncé tout cet échafaudage mis en place pour conduire une transition issue d’un coup d’État. Avec pour argument qu’un coup d’État est de fait un État d’exception. Et lorsqu’on fait un coup d’État on a un programme. Heureusement, la loi prévoit le dispositif règlementaire de gestion du pouvoir en la matière. Pourquoi donc perdre du temps alors que tout est urgent !
Dabaoué Audrianne KANI