Pour ces contemplateurs, c’est le premier mandat de la troisième République issue de la nouvelle Constitution votée par référendum le 8 novembre 2016. Ce qui n’est pas faux. Pris sous cet angle la loi permettait à Alassane Ouattara qui bouclait son deuxième mandat sous la deuxième République défunte de postuler à un autre mandat. Et c’est ce qu’il a fait. Autrement, on ne peut pas l’accuser d’avoir violé la Constitution de son pays. Puisque celle qu’il est sensé avoir violée n’existe plus. Cependant, on n’aurait rien à dire si le nouveau mandat qu’Alassane Ouattara a débuté hier lundi 14 décembre n’était pas le troisième du genre. En fait, c’est le « troisième » qui pose problème. En Afrique, depuis maintenant quelques années, les peuples ne veulent plus entendre parler d’un troisième mandat. Au Niger, en choisissant de ne pas se représenter pour un troisième mandat alors qu’il aurait pu tripatouiller la Constitution pour cela, Issoufou Mahamoudou l’a compris. Même si les élections à venir ne sont pas forcément synonymes d’alternance, le président sortant a donné un signal fort en respectant les termes de la Constitution dans son pays.
Pour ce qui est du cas d’Alassane Ouattara, le deuxième problème est que lui-même avait déjà annoncé qu’il ne se représenterait plus. Mais entre temps, son dauphin et candidat choisi, Amadou Gon Coulibaly meurt. Dans la crainte d’une perte du pouvoir par son parti et ses partisans, Alassane revient sur sa décision et décide de briguer la présidence ; le troisième mandat légitimement de trop.
Qu’à cela ne tienne, aujourd’hui en Côte d’Ivoire, le registre ouvert en ce moment est celui de savoir comment traverser ce troisième mandat sans trop de dommages pour la paix dans le pays. Cela est d’autant plus vrai que l’opposition conteste jusqu’à présent la réélection d’Alassane Ouattara. En outre, le fait que certains leaders soient présentement en prison pour avoir mis en place un Conseil national de la transition n’arrange pas la situation.
Cependant la présence à son investiture de la dizaine de chefs d’Etat et de nombreuses autres personnalités (trois anciens chefs d’Etat) et la quasi-totalité des chefs d’Etats ouest-africains vient légitimer son mandat et renforcer la position de son pays en tant que locomotive de l’économie dans cette partie de l’Afrique.
Mais, cela ne devrait pas suffire à Alassane pour croire que tout est acquis. L’opposition insiste pour l’ouverture d’un dialogue politique sur la « refonte de la constitution et l’organisation de nouvelles élections ». C’est dire que le bras de fer entre pouvoir et opposition va se poursuivre. Risquant ainsi de polluer l’atmosphère politique, voire sociale tout au long de son mandat. Alassane Ouattara et ses partisans ne doivent pas se satisfaire tout de suite après cette investiture. Car en plus de son programme politique qu’il faut mettre en œuvre, Alassane Ouattara doit réconcilier les Ivoiriens et ouvrir ainsi définitivement la voie à une paix durable.
Dabaoué Audrianne KANI