Quand on entend quelqu’un parler de foncier, notamment de parcelles dans certains milieux, tous les regards sont tournés vers lui et du coup s’installe un silence de mort. Tellement la question foncière au Burkina Faso est préoccupante, que certaines personnes réfléchissent par deux fois avant de l’évoquer. Heureusement qu’il ne peut en être ainsi de Bénéwendé Stanislas Sankara, ministre de l’Urbanisme, de l’Habitat et de la Ville. Lui qui a en charge ce dossier aussi corsé que celui de Zéphirin Diabré (la réconciliation nationale). On pourrait même dire que Zéphirin Diabré a beaucoup plus de facilités de réussir sa mission que Bénéwendé Sankara. On comprend pourquoi, Bénéwendé Sankara va doucement.
D’abord parce qu’au Burkina Faso, chacun veut avoir une parcelle. Alors que cela n’est pas possible. Comment expliquer aux populations qu’il est impossible d’attribuer à chaque Burkinabé, individuellement une parcelle ? Personne n’y croira car pour beaucoup de Burkinabé, si les uns ont des parcelles, les autres doivent en avoir. Point !
Ensuite, comment faire en sorte que la terre ne soit pas vendable. Et même si elle devait l’être, qu’elle soit accessible. Voilà aussi une question difficile à résoudre. Au Burkina Faso, la terre vaut de l’or et qui a des hectares de terres est riche. Du coup, les pauvres sont soit dépossédés de leurs terres au bénéfice des plus nantis qui les achètent, créant ainsi de nouveaux pauvres s’ils ne rendent pas plus pauvres ceux qui l’étaient déjà.
Enfin, c’est toute la problématique du combat que doit mener le ministre Sankara. Qu’on veuille l’entendre ou non, les terres au Burkina Faso sont aujourd’hui entre les mains des plus riches (dans l’administration ou dans le privé). Comment faire comprendre à ces gens-là qu’il y a à côté d’eux des pauvres qui n’ont besoin qu’une portion de terre soit pour cultiver et se nourrir, soit pour se bâtir un logis et y demeurer avec sa petite famille.
S’il sera difficile au ministre Sankara de faire entendre la raison de ces pauvres Burkinabé aux plus nantis, détenteurs du foncier, il peut par contre négocier des logements à prix social. Ce qui nous ramène à la première préoccupation : faire comprendre aux Burkinabé qu’ils ont besoin de logements et non de parcelles où chacun construira pour lui-même sa propre maison et y loger seul. Autant le transport en commun va s’imposer à nous, autant le logement en commun va l’être. Autant commencer tout de suite.
C’est pourquoi, l’Etat doit prendre toutes ses responsabilités pour offrir des logements aux Burkinabé. C’est inscrit dans la Constitution. Sous la transition (2014-2015), une loi avait été votée pour plafonner les prix des loyers. Sur le terrain, aucune application n’en a été faite. Des projets de logements sociaux s’exécutent sur le terrain. Mais apparemment, ils sont déjà dépassés avant d’être terminés. Il ne sert à rien de parceller des espaces, y construire de petites maisonnettes pour y loger une seule famille. Alors que sur la même parcelle, on peut loger des dizaines de familles. Alors !
Dabaoué Audrianne KANI