Baisse des prix de la dialyse: sans l’ouverture d’autres centres de dialyse, la mesure n’aura pas l’impact souhaité Dr Judicaël Da, médecin néphrologue

Le Conseil des ministres du mercredi 13 mars 2024, en a décidé ainsi. Les tarifs de certains examens médicaux sont revus à la baisse. Il s’agit du scanner, de l’Imagerie par résonance magnétique (IRM) et des actes d’hémodialyse. Pour ce qui est de l’hémodialyse, nous avons rencontré Dr Judicaël Da, médecin néphrologue, chef de service par intérim de la néphrologie à l’hôpital Souro Sanou, ainsi que des patients dyalisés.

A partir du 1er avril, la caution pour l’hémodialyse à vie passe de 500 000 FCFA à 0 FCFA et la séance de dialyse aiguë passe de 15 000 FCFA à 2 500 FCFA. Si cette décision est saluée par Dr Judicaël Da, celui-ci relève des inquiétudes. Pour lui, «le prix de l’hémodialyse est un facteur limitant pour la prise en charge de certains malades. Avec cette nouvelle mesure, cela va permettre d’atténuer les charges au niveau des malades. Dans la perspective immédiate, la décision est bonne, mais profitera-t-elle au patient ?», s’interroge-t-il. Toujours selon lui, «les centres de dialyse nationaux sont déjà saturés, même avec la caution de 500 000 FCFA, les gens étaient prêts à intégrer la file d’attente, mais du fait qu’on est limité on ne peut pas. Le centre de Bobo-Dioulasso a une capacité de 125 places de dialyse chronique. Nous avons le double, voire le triple qui attend la dialyse. En levant le forfait de 500 000 FCFA, sans l’ouverture d’autres centres de dialyse, la mesure n’aura pas l’impact souhaité», estime Dr Judicaël Da qui souligne que si rien n’est fait dans ce sens, des problèmes pourraient naitre entre les personnels soignants et les patients.
Avis de patients dialysés sur la question
Pour Sanou/Traoré Salimata, dialysée depuis 3 ans, cette mesure est salutaire, mais le problème de matériel subsiste comme l’a souligné Dr Judicaël Da.
«Cette décision est la bienvenue et salutaire. Nous disons infiniment merci au président Ibrahim Traoré pour ces décisions. Nous, les anciens malades, pensons qu’un pas est déjà franchi, et nous espérons que ce pas va aller plus loin encore. Pour moi en tant que dialysée chronique, ceux que ça soulage actuellement ce sont les nouveaux malades à venir, puisque nous, nous avons déjà payé 500 000 FCFA. Donc, c’est bénéfique pour les nouveaux malades. Nous demandons surtout pour le centre de Bobo-Dioulasso, plus de générateurs puisque nos générateurs sont insuffisants pour les malades, vu que nous-mêmes qui sommes déjà malades, les générateurs ne nous suffisent pas. Moi par exemple, je suis à mon 2ème embranchement depuis le matin et jusqu’à midi je ne suis pas encore branchée. Cela est dû à l’insuffiance de générateurs. Donc, il nous faut des générateurs et recruter plus de personnel soignant ; que ce soit les infirmières ou les néphrologues».
Adama Ouédraogo, représentant des malades dialysés de Bobo Dioulasso, après avoir salué la mesure, embouche la même trompette que Sanou/Traoré Salimata. «Présentement on n’a pas assez de places pour accueillir tout le monde. Si vous demandez aux néphrologues, ils vous diront qu’ils ont une longue liste d’attente de personnes malades qui veulent la dialyse, mais n’ont pas de place. Nous souhaitons une extension de ce centre. Ici nous n’avons que 15 générateurs pour plus de 120 malades. La dialyse se fait 3 fois par semaine normalement. Mais ici nous n’avons que 2 séances. C’est déjà bon, car il fut un moment où on avait qu’une seule séance par semaine et c’était à Ouagadougou. Ce centre n’était pas encore ouvert».
Néphrologue et malades sont donc tous unanimes que la nouvelle mesure sur les coûts de la dialyse est bonne, mais il faut un renforcement des équipements pour pouvoir prendre en charge le maximum de malades.

Aymeric KANI