Concerts de masques et  »chants d’oiseaux funéraires » : le sérieux des traditions à Baré et Kôrô

Situé à une vingtaine de kilomètres de Bobo-Dioulasso, la localité de Baré a eu sa cérémonie d’initiation  »des 14 ans », ce samedi 24 avril 2021. Avec cette note particulière : le grand sérieux des autochtones traditionnalistes à voir leur traditions et cultures perdurer par un respect strict de leur observance. Comme bien d’autres villages bobos.

Sur la grande voie qui passe par Baré, deux panneaux de sécurité. Une qui demande aux usagers de ralentir leur vitesse, une autre qui signale que des cérémonies coutumières sont en cours dans le village et que leur accès est interdit aux personnes étrangères. Mais, tous sont en fait invités. Sauf les initiés ont un accès direct aux lieux sacrés dans la forêt et dans le village. L’accueil et la danse des masques étant ouverts à tous. Des personnes ont fait le déplacement de loin comme nous, certains sur invitation.

Notre premier interlocuteur explique que  »c’est en principe tous les quatorze ans que se tiennent ces cérémonies de passage d’une génération à une autre ». Il n’en dira pas plus, de peur de trahir le Dô, les interdits des coutumes. Mais dans la pratique, la période varie avec le temps, et selon les villages bobos madarê. Il faudrait s’entretenir avec les anciens pour en avoir le cœur net. En ce jour mémorable de célébration coutumière à Baré, cette démarche est une gageure. L’on doit attendre ou se contenter de réponses éparses de personnes non commises à la tâche de répondre à ces questions. Ce n’est que partie remise. Nous attendons le temps qu’il faut, avant que ne se présente enfin les premiers signes d’arrivée des masques. Les enfants qui avancent loin devant, pour avoir la primeur de la première apparition des masques.

Le spectacle est impressionnant quand ils se montrent enfin. Ces longs masques, de vives couleurs neuves et ce concert de chants au sens inaccessible aux profanes que nous sommes. La présence de personnes d’un certain âge et bien d’autres signes témoignent du sérieux. On se passe le mot dans la foule :  » ils ont dit de ne pas filmer ». Mais la tentation semble trop forte pour certains spectateurs. À défaut de filmer, on peut peut-être prendre quelques photos ? Sans doute, si on a n’a pas de  »mauvaises intentions ». A la vue de personnes qui immortalisent l’entrée des masques au village (ils sont de la cérémonie et descendent avec les masques), les Smartphones et similaires sortent des poches et c’est partie pour les prises de vue,  »sans exagérations ». Pas de réaction, même à l’approche des masques. L’accord est considéré comme tacite. Les masques font leur randonnée coutumière. La danse aura lieu plus tard. À une trentaine de minutes d’intervalle, une deuxième vague de nouveaux initiés entre dans le village avec leurs masques, mais par une autre voie.

 »Il s’agit de deux cérémonies jumelles, car Baré est constitué de  »deux quartiers : l’ancien et le nouveau Baré », nous explique un habitant du village.  À quelques différences près, nous assistons au même cérémonial. Il faut passer à côté de la grande mosquée de Baré pour passer d’une cérémonie à une autre.  » Il y aurait eu plus de monde n’eut été le carême ! » Certes. Mais le nombre de participants est déjà assez impressionnant. La deuxième danse est programmée pour 20 heures. Nous n’y prendrons pas part. Nous sommes attendus chez des parents et connaissances.  »Ça ne se refuse pas ! C’est une dette qu’on se rembourse de village à village ». Après deux familles où de copieux repas sont servis, nous demandons la route. D’autant plus qu’il faut passer par Kôrô pour obligatoirement satisfaire à la cérémonie  »des chants d’oiseaux’, en préludes aux grandes funérailles qui y auront lieu ce dimanche. Ce, d’autant plus que les masques de Pala dont nous sommes partis, seront de la partie. C’est dans la pénombre ce samedi nuit, que nous escaladons les pierres ancestrales de Kôrô. Une heure plus tard, se feront entendre les  »oiseaux », au rythme des tams-tams et des chants de griottes, jusqu’aux environs de deux heures du matin…

Sibiri SANOU