Fin de saison champêtre à Pala : Les enfants s’amusent, les anciens commémorent

Le village forgeron de Pala, dans l’arrondissement 5 de Bobo-Dioulasso est souvent en première ligne des célébrations coutumières chez les Bobos de la région. Le week-end dernier, des manifestations traditionnelles y ont marqué la fin ‘’officielle’’ de la saison champêtre avec les dernières récoltes rentrées au village. Occasion de fête pour la jeunesse, respect et soucis de préservation des traditions pour les anciens.

Deux manifestations distinctes ont animé le village de Pala le week-end passé, de vendredi à dimanche. Celle du samedi, beaucoup plus ‘’sérieuse’’ et médiatisée, a concerné l’inauguration de ce qu’on pourrait appeler la maison mère du village, le ‘’Dokon’’ entièrement reconstruit et qui abrite en particulier la forge principale du village maintenant vielle de plusieurs siècles. Y ont présidé le chef du village de Pala, Sa Majesté Sogossira Sanon entouré des notabilités coutumières du village. Des centaines de personnes ont composé l’assistance de la cérémonie. Des autochtones, des frères et sœurs d’autres villages, des ressortissants du village de Pala venus d’autres régions du pays, des visiteurs et officiels ont également fait le déplacement depuis Ouagadougou et Bobo-Dioulasso. Ce public qui a afflué dans le village dans la matinée de ce samedi 19 février 2022, a assisté aux cérémonies de réinstallation de la forge à travers des rites divers.

Jour de fête au village

Parallèlement à cette inauguration du nouveau bâtiment culturel du “Dokon” (maison du Dô), s’est effectué la festivité annuelle de fin de saison hivernale ou champêtre, marquée par la fin des récoltes. Ces deux jours de célébrations se terminent habituellement par une soirée dansée des futures générations, ce qui fait qu’on l’appelle généralement la fête des jeunes. Selon les explications d’un aîné du village, le forgeron Sanon Yacouba, c’est surtout les derniers initiés du village qu’on y voit en uniforme s’adonner à cette danse très rythmée avec des grelots aux pieds, avec la participation de leurs petits frères. «C’est en fait leur première danse après l’initiation», explique un autre. La danse est surtout masculine mais elle reste ouverte aussi bien aux filles qu’aux personnes âgées qui peuvent s’y introduire au lieu de se contenter d’assister, si le cœur leur en dit. C’est aussi le jour des beaux habits en uniforme (selon les ‘’maisons’’ ou quartiers du village) et des belles parures.

Bref, un jour de fête au village ! Mais le «Sani-Bigué»  (ainsi qu’on l’appelle en langue locale) que personne ne peut avoir ici le courage d’interdire malgré le Coronavirus, malgré quelques restrictions pour le respect de quelques gestes barrières, est évidemment une affaire sérieuse qu’on respecte à la lettre chaque année, sous le contrôle des anciens. C’est ainsi que tout commence la veille au petit matin avec le départ de ces jeunes garçons «aux champs» pour des cérémonies «purificatoires et de reconnaissance à Dieu et aux forces pourvoyeuses de pluie et de bonnes récoltes». Ces gestes cérémoniels dirigés par un ancien, se terminent au village par des libations et des bénédictions arrosées d’eaux de canaris fraiche, répandue en gouttelettes sur la tête des jeunes rassemblés, pour le bien-être et la tranquillité sociale dont chacun doit se faire l’artisan et non le fossoyeur. Ce pacte social tacite dont la violation grave (quand la réparation devient impossible) est l’une des pires erreurs à ne pas commettre en pays bobo. Et il n’est d’autochtone qui ne le sache pas !

Sibiri SANOU