Les Burkinabè ont voulu voter tranquillement et rompre définitivement avec les contentieux postélectoraux qu’on connaît ailleurs dans d’autres pays. Malheureusement, le désordre constaté dans le déroulement des opérations de vote le 22 novembre ne le permettra pas. Car, tout porte à croire qu’on s’achemine vers des plaintes devant le Conseil constitutionnel, la juridiction compétente en matière d’élections présidentielle et législatives. Des électeurs régulièrement inscrits n’ont pas retrouvé leurs noms sur les listes électorales. Qui n’ont pas été affichées auparavant. Des bureaux de vote ont manqué de bulletins. On a même demandé à des électeurs de voter soit la présidentielle parce qu’il y avait des bulletins et de revenir après pour les législatives quand les bulletins seront disponibles. Ainsi, de nombreux électeurs après avoir longtemps attendu et désabusés sont repartis chez eux. Du matériel prévu pour les mêmes bureaux de vote n’a jamais été acheminé. Des bureaux de vote ont été supprimés sans que les électeurs ne soient informés, si bien que certains sont repartis, ne sachant où voter. Bref, les griefs sont assez nombreux.
Même s’ils ne peuvent pas avoir des répercussions graves sur l’ensemble du vote, des dysfonctionnements viennent ternir l’image démocratique du pays des hommes intègres. Si la démocratie a voulu s’exprimer, les conditions de l’organisation des élections ne le permettront pas. Qu’est-ce qui a bien pu se passer ? Qui a-t-il organisé tout ce désordre ? Si ça doit servir à quelqu’un, ce n’est certainement pas au peuple burkinabé ? Ce n’est pas non plus le pouvoir en place qui, même s’il n’est pas l’organisateur principal et direct des élections, en porte tout de même la responsabilité morale. Notamment en tant que garant de l’ordre et de l’exemplarité du travail bien fait dans le pays.
Ce désordre vient apporter de l’eau au moulin de ceux de l’opposition qui ont toujours accusé le pouvoir de tous les maux dont souffre le Burkina Faso. Ils n’iront pas du tout loin pour dire que tout ce désordre est à l’image de la gouvernance du moment. C’est pour cela qu’au-delà des traditionnelles excuses qu’on sert en cas de manquements, la Commission électorale nationale indépendante (CENI) doit se saisir de la question, retrouver tous ceux qui ont saboté le processus (c’est bien de cela qu’il s’agit) et les sanctionner. Dans un premier temps, il s’agit de l’argent du contribuable (une centaine de milliards de (F.CFA) qui a été mis dans ces élections. Ensuite, les risques sont grands quand une élection à un tel niveau est mal organisée (crise postélectorale avec toutes ces conséquences). Déjà que le pays ne se porte pas bien sur les plans sécuritaire, social et de cohésion, jouer à un tel jeu, ne doit pas être impuni. Laisser passer de tels agissements pourrait consister à donner une prime à l’incivisme et à la mauvaise gouvernance. Aucun des treize candidats à la présidentielle ne souhaitait être élu dans de telles conditions. Les députés à l’Assemblée nationale non plus.
Dabaoué Audrianne KANI