Congrès Extraordinaire du PAREN : « Une jeunesse mal formée est un passeport pris par la nation pour l’enfer », Abdoul Karim Sango, nouveau président du PAREN

Le Parti de la renaissance nationale a tenu les 28 et 29 mai 2021 un congrès extraordinaire. A la cérémonie de clôture, le nouveau président du parti, Abdoul Karim Sango a prononcé un discours « historique » dont nous vous proposons des extraits.

 Crise malienne

« Nous sommes de cœur avec le grand peuple malien dans sa marche vers une société démocratique plus forte. Le destin de nos peuples et de nos nations est si intimement lié que ce qui touche un pays affecte les autres. Je voudrais appeler à une solidarité plus active entre nos organisations pour peser positivement sur la marche de l’histoire dans nos pays respectifs.

C’est pour nous le lieu d’interpeller l’Union africaine et la CEDEAO sur leur responsabilité à faire respecter les grands principes de convergence constitutionnelle dans les différents Etats. Les principes de la démocratie et de l’Etat de droit ne peuvent être interprétés à géométrie variable au risque de galvauder la démocratie elle-même.

C’est pourquoi, à partir de Ouagadougou, nous lançons un appel à la mise en place urgente d’une sorte de front uni des partis ayant en partage le développement endogène ».

 Refonder le Burkina

Le thème du congrès extraordinaire du parti qui nous réunit en ce jour à savoir : « Refonder le Burkina nouveau sur le socle du développement endogène » est interpellateur. En effet, depuis près de cinq décennies, le concept de mondialisation ou de globalisation s’impose à tous et semble correspondre au triomphe de l’économie de marché avec ses conséquences sur les plus faibles. La disparition de l’économie socialiste a révélé la face hideuse de l’économie de marché.

De brillants économistes comme le prix Nobel d’économie Joseph Stiglitz ont courageusement dénoncé l’économie de marché qui conduit à une très forte paupérisation des populations dans le monde alors que dans le même temps une infime minorité de gens voit leur revenu croître de façon exponentielle.

Les gens sont hyper riches au point de ne savoir que faire avec l’argent. En réalité, cette civilisation industrielle est aujourd’hui à son couchant et l’humanité est appelée à entreprendre un long et douloureux pèlerinage dans le passé pour y retrouver et regrouper les matériaux nécessaires à la construction d’une nouvelle civilisation.

De tout temps et dans toute société, il s’est retrouvé des hommes et des femmes qui se sont donnés pour mission de réfléchir à partir du passé sur le devenir de l’ensemble du corps social. En effet, si le passé n’éclaire pas le présent, l’esprit marche dans les ténèbres. Mais, il faut le dire, une telle démarche n’a de sens et d’intérêt que si les hommes savent en tirer profit pour se construire un devenir humain viable.

Multipartisme

La qualité de la démocratie ne se mesure pas à la quantité du nombre de partis politiques. Notre multipartisme débridé avec plus d’une centaine de partis politiques est un obstacle à la qualité de la gouvernance démocratique. Selon le professeur Maurice Duverger, la plupart des Etats africains francophones sont à l’âge de la préhistoire du multipartisme en raison du nombre pléthorique de partis politiques.  Si nous continuons ainsi, dans 100 ans, je crains que nos Etats ne restent au stade de pays pauvres.

Nous lançons l’appel à la constitution de grands regroupements de partis politiques autour des idées et valeurs communes partagées. Cher professeur, je sais que vous vous êtes battu pour l’union, voire la fusion de partis politiques burkinabè. Hélas, vous avez été incompris sur le sujet ! Je promets de poursuivre ce combat.

Les voix des générations passées

J’entends les voix des générations passées, paix à leurs âmes, nous interpellant sur notre mission de génération. Eux, ils ont aidé à basculer la non-histoire fossoyeuse de notre histoire. Ils ne sont pas définitivement partis. Ils restent présents parmi nous par leurs noms, leurs œuvres : « leurs œuvres les poursuivent ».

Je pense à cette élite, mobilisée autour de la chefferie traditionnelle conduite par le Moogho Naba Saagha, qui s’est battue pour la reconstitution de la Haute-Volta en 1947 et notamment au Naaba Tigré de Ouahigouya, à Guillaume Ouédraogo, Kalenzaga Christophe, Kogoda Sigué, Henri Guissou, etc.

Je pense aussi à ces intellectuels qui se sont battus pour l’accession à l’indépendance. Je fais ici mémoire de Daniel Ouezzin Coulibaly, le maître comme l’appelait ses anciens élèves de l’école William Ponty. Les nombreux témoignages, notamment à ses obsèques, le reconnaissent comme le héros légendaire, le lutteur infatigable, le travailleur acharné, le patriote personnifié, le Grand africain doué d’une intelligence exceptionnelle qu’il a su mettre au service de son pays et de l’Afrique.

Il est le grand père du Paren car, le 20 mai 1958, à l’Assemblée territoriale, il avait déclaré : « Nous revendiquons le droit de trouver par nous-mêmes, les voies et moyens d’assurer, dans le calme, le développement de notre pays». Pierre Mesmer, le Haut-commissaire de la République française dira de Daniel Ouezzin Coulibaly qu’il avait de hautes qualités humaines : courageux, intelligent, se refusant à toute compromission sans jamais pour cela tomber dans le sectarisme, enthousiaste, dévoué car l’homme, au sens large et noble de ce mot, fut toujours son souci permanent.

Je pense à ces intellectuels tels Nazi Boni, Maurice Yaméogo, Gérard Kango Ouédraogo, Issoufou Joseph Konombo, Phillipe Zinda Kaboré, Sangoulé Lamizana, Thomas Sankara, etc. qui ont sacrifié leur vie à la construction d’une nation burkinabé et à l’intégration africaine.

Crise de l’éducation

L’éducation de nos jeunes doit être une affaire d’intérêt national et qui préoccupe tout le monde. Dans la crise actuelle qui traverse le système éducatif, le Paren appelle à une plus grande responsabilité des acteurs ; qu’ils soient parents, enseignants, élèves ou gouvernants. Sans contester leur droit à l’information, les élèves doivent rester dans leur rôle d’apprenants. Voilà pourquoi, nous appelons à un dialogue direct franc et sincère autour des sujets actuels qui font monter la tension inutilement dans nos écoles. Une jeunesse mal formée est un passeport pris par la nation pour l’enfer.

Terrorisme et extrémisme violent

Notre pays, l’Afrique et le monde sont confrontés aujourd’hui à une violence extrême. Notre parti doit contribuer à construire la paix nationale et régionale. Il s’agit donc de convertir notre état d’esprit car la paix ne peut se construire dans les sentiments de peur, d’hostilité, de mépris et de défiance réciproque, des préjugés ethniques et des partis pris. Militants du PAREN, nous ne devons pas nous laisser dominer par la peur de l’autre.

Comme le conseillait Nelson Mandela, « pour faire la paix avec un ennemi, on doit travailler avec cet ennemi et cet ennemi devient vote associé ». Il affirmait également que : « J’ai toujours su qu’au plus profond du cœur de l’homme résidaient la miséricorde et la générosité. Personne ne naît en haïssant une autre personne à cause de la couleur de sa peau, ou de son passé ou de sa religion. Les gens doivent apprendre à haïr, et s’ils peuvent apprendre à haïr, on peut leur enseigner aussi à aimer, car l’amour naît plus naturellement dans le cœur de l’homme que son contraire…  La bonté de l’homme est une flamme qu’on peut cacher mais qu’on ne peut jamais éteindre ».

Confrontée à la dure réalité de l’extrémisme violent et du terrorisme depuis quelques années, j’ai foi que notre nation remportera la victoire sur ces phénomènes. Tout en saluant les efforts entrepris pour mieux équiper nos forces de défense et de sécurité dont nous saluons l’engagement sur le terrain de combat, nous invitons le gouvernement à la recherche de réponses endogènes prenant en compte nos valeurs culturelles.

Jamais dans l’histoire de l’humanité, ceux qui ont pour projet de donner la mort n’ont vu leur projet prospérer. Nous devons être davantage unis et solidaires dans ces dures épreuves.

Réconciliation

Notre parti adhère à la réconciliation nationale. Mais les Burkinabè ont besoin individuellement, chacun en ce qui le concerne, de se réconcilier d’abord avec sa propre conscience. Et les leaders politiques ont une grande part de responsabilité dans les drames que vivent nos peuples habitués à vivre ensemble de façon harmonieuse.

Ce sont les politiciens, donc nous tous, qui avons divisé les Burkinabè en instrumentalisant soit l’ethnie, la religion, la politique, soit en tenant des discours complètement irresponsables. Nous devons nous réconcilier dans la vérité et la justice parce qu’il n’y a pas d’avenir possible pour une nation divisée contre elle-même.

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