Ce n’est qu’un secret de polichinelle. La question du foncier au Burkina Faso ces dernières années est une véritable préoccupation. Plusieurs voix se sont levées et continuent de dénoncer, surtout au sein des organisations de la société civile,‘’un accaparement des parcelles par les sociétés immobilières, au détriment de la population’’. C’est le cas en ce moment où des résidents de la zone non-lotie du secteur 29 (Koubawé), quartier Belleville de Bobo-Dioulasso, se plaignent, une fois de plus.
Nous avons rencontré l’un de des plaignants dans la matinée du lundi 17 janvier 2022, qui a voulu se prononcer sous le couvert de l’anonymat. De prime à bord, notre interlocuteur dit ne pas « comprendre que malgré la suspension des lotissements à Ouagadougou et Bobo-Dioulasso, des promoteurs immobiliers puissent toujours avoir la latitude de borner des parcelles pour les vendre en l’état ou y construire des habitations avant de le faire ». Il tient ces propos parce que, dit-il, « un constat a été fait dans ce mois de janvier 2022 à Koubawé, cette zone non-lotie du secteur 29 de Bobo et il s’agit de l’abattage d’arbres en grand nombre sur une superficie non négligeable ».« Ces arbres sont principalement du karité et du néré », précise-t-il. Face à ces affirmations, une équipe de L’Express du Faso s’est rendue sur les lieux afin de constater de visu les faits. Sur les lieux, ce qu’on a vu n’était pas contraire à ce qui nous a été dit. La question qu’on s’est posée sur le champ, a été : « pourquoi abattre un si grand nombre d’arbres fruitiers à la fois ? »Le plaignant affirme, qu’il s’agit d’un processus de bornage de parcelles qui débute, mené par un promoteur immobilier, en l’occurrence, la société Abdoul Service International.
Comme la zone en question relève de la mairie de l’arrondissement 7, ce dernier dit avoir pris langue avec un conseiller dudit arrondissement sur la question. Le conseiller reconnaitra que plusieurs personnes l’ont contacté au téléphone sur la même question et que durant leur dernière session, il n’a pas été fait cas de ce processus d’abatage d’arbres pour un bornage quelconque. C’est dans cela qu’ils sont allés abattre des arbres dans le champ d’un riverain. Ce dernier, sans autre forme de procès saisit le préfet du département de Bobo. Qui, à travers une note « prie et au besoin requiert Monsieur le Chef de Service Départemental de l’environnement de Bobo-Dioulasso de bien vouloir procéder au constat des dégâts causés par Abdoul Service dans le champ de Monsieur… domicilié à Bobo ». Le constat devra faire l’objet de procès-verbal dressé en présence des parties plaignantes, à en croire la réquisition. Ce que notre interlocuteur regrette, « est qu’après le processus, les terrains seront vendus au détriment des populations les plus démunies. Ce que la population veut, soutient-il, est que le domaine de la promotion immobilière soit assaini ». A ce propos, le même jour, 17 janvier 2022, le ministre en charge de l’Habitat, Me Bénéwendé Sankara et le Directeur général de l’habitat et de la construction, Camille Soubéïga, étaient face à la presse à Ouagadougou. Il y est ressorti que concernant les projets immobiliers, seulement 105 dossiers ont été jugés recevables sur 400 dossiers traités. N’omettons pas non plus que la délivrance de l’agrément sur la promotion immobilière a été suspendu en mars 2019 ; ce qui maintient à 275, le nombre de promoteurs immobiliers autorisés à exercer.
Que dit la mairie de l’arrondissement 7
Juste après avoir fini avec notre interlocuteur, nous avons immédiatement pris la direction de la mairie de l’arrondissement 7 située à Belleville, pour en savoir davantage. Il est 11h environ, lorsque nous arrivons sur les lieux. Juste quelques instants après, nous avons pu échanger avec le protocole, à qui nous avons posé notre doléance, à savoir, rencontrer l’agent domanial de la mairie. Le protocole nous a installés dans son bureau situé au premier niveau du bâtiment puis nous a introduits auprès de l’agent domanial. Après quelques minutes d’échanges, qui nous ont permis de lui donner les raisons de notre visite, ce dernier suggère de nous référer au Secrétaire général. Visiblement, le dossier n’était pas méconnu de la maison, mais l’évoquer s’emblait ne pas être à l’ordre du jour. Mais après avoir été reçu par Etienne Bako, le Secrétaire général, après 3h d’horloge d’attente, il nous confiera que la société Abdoul Service Internationale « bénéficie d’une délibération de la mairie datant de décembre 2019 ».
Pour ne pas faire croire à un acharnement contre une quelconque société immobilière, nous avons contacté le service de communication de Abdoul Service International. La démarche avait pour but de savoir si cette dernière avait, après la délibération de la mairie de l’arrondissement 7 en sa faveur, le quitus du ministère en charge de l’urbanisme pour procéder à des aménagements dans la zone en question, car des riverains ne cessent de se plaindre. Après échange avec le chargé de communication de Abdoul Service International, joint par téléphone, celui-ci nous fera savoir qu’il faut introduire auprès de la structure une requête pour tenter d’avoir les informations souhaitées.
Abdoul-Karim Etienne SANON
Aymeric KANI