La première question qui revient toujours à chaque 5-Août, date anniversaire de la commémoration de la proclamation de l’indépendance de la Haute-Volta devenue Burkina Faso le 4-Août 1984 est : «sommes-nous réellement indépendants ?». La réponse, il semble est sans équivoque : « nous sommes indépendants».
D’abord si les devanciers dont nous saluons les efforts à chaque fois n’avaient pas cru, ils n’auraient pas lutté pour en arriver là. Car, quoi qu’on dise, les indépendances n’ont pas été données par le colonisateur de cœur joie. Si des gens se sont donc battus pour arracher ces indépendances, c’est qu’ils avaient des raisons de le faire. La preuve en est qu’aujourd’hui, nous sommes toujours fiers de commémorer ces indépendances qui constituent des moments très importants d’introspection de nos consciences individuelles et collectives. Oui, c’est bien de cela qu’il s’agit car l’importante question à laquelle nous refusons souvent de répondre franchement, c’est bien celle de savoir ce que nous avons fait de nos indépendances.
Le 3 janvier 1966 ; six ans après la proclamation de l’indépendance, les organisations syndicales et de masse face à la gabegie du régime du président Maurice Yaméogo ont dit non. Maurice Yaméogo a été contraint de quitter le pouvoir. Cela date que nous commémorons chaque année a marqué une prise de conscience du peuple face à son destin. Mais qu’avons-nous fait après ce 6 janvier 1966 jusqu’au 25 novembre 1980 pour que les colonels décident, par un coup d’Etat de mettre fin au régime de Sangoulé Lamizana ? Qu’avons-nous fait pour que le 7 novembre 1982, le Comité de salut du peuple de Jean-Baptiste Ouédraogo décide de mettre fin au règne des colonels ? Le 4 août 1983, ce fut le tour des capitaines de prendre le pouvoir ? Toujours après un coup d’Etat. Ils proclament la Révolution démocratique et populaire dont ils étaient fiers. Le 15 octobre 1987, Thomas Sankara est tué dans un coup d’Etat. Blaise Compaoré arrive au pouvoir et instaure plus tard le multipartisme. Le soleil des démocraties, peut-on dire. 27 ans après au pouvoir, il est renversé par un deuxième soulèvement. Une transition qui devait réorganiser la gouvernance politique est insaturée. Roch Marc Christian Kaboré sera élu président du Faso. Si nous devons continuer à nous interroger sur notre indépendance, nous devons surtout nous poser la question de savoir ce que nous avons fait de toutes ces occasions que nous avons eues pour assumer véritablement notre indépendance.
Sous le règne de Thomas Sankara, tout a été mis en œuvre pour que nous soyons réellement indépendants. Nous avons manqué l’occasion. Les deux soulèvements populaires ont été des occasions pour marquer notre indépendance. Nous les avons toutes ratés. Les multiples coups d’Etat, pour la plupart sanglants, que le pays a connus sont la preuve de l’inconstance de la classe dirigeante, politique ou intellectuelle, à assumer et à assurer notre véritable indépendance. La situation d’insécurité et de difficultés diverses que nous vivons en est encore la preuve. Le problème de nos Etats, c’est nous-mêmes.
Dabaoué Audrianne KANI