Lutte contre la corruption, le combat vain des anticorruptions

«Depuis les dernières élections présidentielle et législatives, moi j’ai compris que dans ce pays-là si tu n’as pas d’argent, tu ne seras rien. Aussi, lorsque tu as un problème, il vaut mieux donner quelque chose pour qu’il soit résolu, sinon personne ne prendra ton cas au sérieux ». C’est par ces mots que s’est exclamé un usager alors qu’il demandait un service dans une administration publique. A dire donc que le combat des anticorruptions est vain ? Certainement, quand on considère que dans la plupart des services (du public comme du privé) demander un service revient à donner quelque chose. Autrement, la manière est toujours la même : « c’est difficile, mais on verra. Je ne te garantis rien, mais de toute façon, je ferai ce que je peux pour te satisfaire ». Du coup, le demandeur se voit dans l’obligation morale de faire un geste.

En effet, la corruption est très subtile au Burkina Faso. Surtout la petite corruption. Elle s’exprime de plusieurs façons sans que le corrupteur ne l’exprime réellement. Si bien que pour la combattre, il devient de plus en plus difficile. Mais cela ne doit pas être une raison de découragement des anticorruptions. Au cas contraire, il faut intensifier la lutte, surtout la sensibilisation de la jeunesse. Quand on est payé par l’administration ou par un service privé  pour faire un travail, on ne se fait plus payer par l’usager pour le satisfaire. Cela doit être enseigné aux plus jeunes. Car l’envie ou la satisfaction d’avoir rendu service doit primer sur ce que l’on gagne. C’est cela aussi la conscience professionnelle.

Quant à la grande corruption, véritable gangrène, elle sape tous les efforts en matière de construction et de réalisation des objectifs du développement. Car, au lieu que la communauté se développe, ce sont quelques individus parce que bien assis sur les réseaux financiers qui se développent. C’est bien ce qui s’est passé pendant longtemps dans certains de nos pays. La maladie à Coronavirus est venue nous le démontrer quand personne ne pouvait quitter son pays pour un autre à la recherche par exemple de la santé. Elle est venue pour le démontrer quand les frontières étaient fermées et que chaque pays devait compter sur ses propres ressources ou ses propres productions.

Les Burkinabé doivent désormais comprendre que leur bien-être commun passe par leur engagement à travailler sainement pour le développement de leur pays et non à travailler pour se réaliser individuellement. Tant que ça ne sera pas ainsi, la cohésion sociale, la paix et le vivre-ensemble seront perturbés. Le cas actuel du terrorisme dans les zones sahéliennes le prouve à merveille. Longtemps abandonnées par les pouvoirs successifs (pour des raisons diverses) les populations de ces zones ont pris les armes et se sont retournées contre leurs frères. Aussi, tout ce qui peut empêcher le développement partagé doit être combattu. D’où l’obligation de poursuivre le combat contre la corruption, même si elle semble difficile.

Dabaoué Audrianne KANI