Affaire Kokorowé : Les éleveurs victimes donnent leur version

Dans notre édition du lundi 28 mars, nous titrions “Kokorowé : la demande de pardon du chef de canton refusée”. A travers le droit de réponse ci-après qu’ils nous ont fait parvenir, les éleveurs peuls, victimes, donnent leur version des faits et expliquent pourquoi on en est arrivé devant la justice. Lisez !

Monsieur SIDIBE Amadou

Eleveur habitant à Belle ville bobo
A
Monsieur le Directeur de L’Express du Faso.

Objet : Droit de réponse Bobo le 31 mars 2021
Monsieur le Directeur,
Dans votre livraison du 28 mars 2021, vous titrez : « la réconciliation du chef de Canton refusée ». Vous dites que « Tout est arrivé le 5 mai lorsque pendant des cérémonies coutumières des jeunes ont abattu des bœufs conformément à la coutume qui veut que pendant le déroulement des coutumes, tout animal en divagation est systématiquement abattu ».

D’entrée de jeu, nous vous donnons les précisions suivantes :
-comme vous l’avez dit, c’est une affaire pendante en justice et de ce fait, nous n’aurons vraiment pas souhaité en parler sur la place publique,
-votre article est fallacieux et contient des contre-vérités qui visent à jeter en pâture la communauté peuhle, ce qui nous pousse à réagir,
-la communauté peuhle n’est pas en conflit ni avec les Bobo, ni avec le chef de canton,

-il s’agit d’un problème de vol et de brigandage d’animaux, localisé dans un village ou en pâturage dans la brousse et qui concerne les éleveurs et les agriculteurs de ce village et d’autres villages environnants . En effet les bergers sont poursuivis et sont obligés de fuir pour sauver leur vie, leurs animaux sont abattus et cela depuis plus de 10 ans.
– pour cette année les éleveurs victimes ne sont pas que de l’ethnie peuhle, il y a des éleveurs d’autres ethnies (mossi et sénoufo),

_ Les coutumes Bobo dont il est question ici ne sont un secret pour personne. Ils ne concernent pas les bœufs, ni les moutons, ni les pintades.
Sont concernés les chèvres, les chiens et les poules ; et là aussi les chèvres même en divagation avec corde au cou sont épargnées.

_ Pendant ses coutumes les peulhs de ce village et ceux qui y sont de passage sont poursuivis, chassés et bastonnés, leurs objets personnels (portables, montres et argent) emportés. En 2011, monsieur Sidibé Issa et son épouse enceinte ont été pourchassés et battus dans une cour d’école. Malgré que la bonne dame a fui et est rentrée dans une salle de classe elle fut bastonnée jusqu’à l’écoulement de sa grossesse et au nom de l’entente entre communauté, il n’y a pas eu de poursuite.

Pour ce qui est de faire appel à la justice, tout se passe comme si c’est la première fois alors qu’il a eu beaucoup de cas. Je vais citer un exemple : SIDIBE Drissa, un Peulh et DAO Adama un Bowaba ont pris 2 ans de prison suite à une altercation entre eux et un cultivateur de la zone malgré les nombreuses interventions de la communauté. Il y a quelques années le docteur Bakari Sanou a eu à régler à la gendarmerie un cas où des jeunes avaient abattu des bœufs dans les mêmes situations.

Plusieurs de ces situations ont trouvé des solutions dans la communauté pour ne pas mettre à mal la cohésion sociale. Le maire Salia Sanou en sait quelque chose pour avoir en son temps négocier avec la communauté peuhle le cas de 5 bœufs abattus dans les mêmes situations.

_il faut noter que durant les neufs (9) mois avant l’interpellation des jeunes bobos, à part Alain Sanou le 4eme Adjoint au maire de la commune, aucun Bobo de Kokorowé ni jeune ni vieux n’est venu voir les blessés ni même demander pardon à qui que ce soit. Seul six coutumiers Bobo sont venus voir la communauté peulhe à la chefferie disant appartenir à l’Association des dix chefs bobos (ils sont même partis saluer les blessés). Et notons qu’ils ont précisé n’être des envoyés de personne. Ce n’est qu’après l’interpellation des jeunes bobos que le Chef de canton nous à invités pour une première rencontre.
C’est aussi en ce moment qu’une délégation de Kokorowé est venue à la chefferie peuhle pour se présenter par rapport à cette affaire.

-la communauté peulhe de Bobo, dans toutes ses composantes a répondu à toutes les trois réunions convoquées par le chef de canton autour de ce problème, et même le chef peuhl de Bobo a eu un tête-à-tête avec le chef de canton sur ce problème ; et la communauté reste disponible à tout moment à répondre à son appel,
-la seule demande des victimes c’est le remboursement des frais médicaux des blessés (dont certains ont été battus et laissés pour morts), des animaux abattus, des objets de valeur retirés sur les personnes inconscientes des suites des coups, des documents et des motocyclettes coupées à la hache et au coupe-coupe.
-pour votre information, Monsieur le Directeur, cette situation se répète chaque année depuis plus de 10 ans. C’est le silence des éleveurs, soucieux de vivre en paix qui justifie que vous n’avez jamais entendu parler de ce phénomène de brigandage d’une autre époque, donc trop c’est trop.
Nous pensons que la déontologie de votre métier vous oblige à recouper les informations avant de les publier d’autant plus que votre article concerne un sujet très sensible et délicat à même de mettre à mal la paix et la cohésion sociale.
Est-ce que vous proposez qu’une partie de la population se taise et se soumette pour subir constamment spoliations et violences physiques ? C’est cela la cohésion sociale et le vivre ensemble, Monsieur le Directeur ?
En attente de lire notre droit de réponse dans votre journal, veuillez recevoir nos salutations.

Le représentant des victimes

SIDIBE Amadou

 

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