Affaires de parcelles à Mahon : Les conditions d’attribution de la discorde

 

Un processus d’attribution de parcelles fait des grincements de dents dans le village de Mahon, dans la commune de Kangala, province du Kénédougou. Certaines populations s’offusquent contre un processus d’attribution qu’eux tous avaient entamé. Nous nous sommes rendus dans la localité le 6 décembre 2022 pour en savoir davantage.

Mahon est un village du département de Kangala dans la province du Kénédougou, situé à une centaine de kilomètres de Bobo-Dioulasso via la route nationale n°8. Il y a de cela une dizaine d’années maintenant, les populations de cette localité disent avoir émis la volonté de viabiliser une partie de leur village pour en faire des parcelles à usage d’habitation. Pour ce faire, celles-ci ont fait recours au service domanial pour le bornage des parcelles, disent-elles. Mais voilà qu’une fois le processus de bornage terminé, le recensement de la population et l’attribution des parcelles posent problème. Une partie de la population n’est pas d’accord avec la liste des attributaires rendue publique par la mairie de Kangala, de laquelle relève le village de Mahon. Elles affirment que des irrégularités entachent le processus d’attribution.

« Il faut reprendre le recensement de la population… »

Arrivé à Mahon, nous avons pu entrer en contact avec le chef du village, Issouf Traoré. Ce dernier nous confie que tout comme lui, plusieurs ressortissants de Mahon ne sont pas d’accord avec le processus d’attribution des parcelles. Selon le chef du village, il est tellement entaché d’irrégularités qu’il craint un affrontement entre populations, toute chose qui n’est pas à envisager, à l’entendre. Remonté, il affirme que « moi-même qui suis chef du village, je n’ai pas été recensé ». « D’ailleurs je n’étais même pas au courant », ajoute-t-il. Pour éviter tout problème émanant de cette affaire, Issouf Traoré dit qu’il « faut reprendre le recensement de la population pour l’attribution des parcelles ». Il ne veut pas non plus que les politiques s’en mêlent. A Saydou Traoré, un ressortissant de Mahon, de répliquer qu’actuellement « nous ne voulons que la vérité. S’il y a lieu, il faut reprendre cette histoire de parcelles avec l’accord de tous les notables du village. On ne veut pas de frustration », insiste-t-il. Tout comme lui, Tinzé Traoré souhaite qu’on « reprenne purement et simplement le recensement, car il ne faudrait pas que Mahon soit à feu et à sang à cause de cette situation ». Pendant le recensement, ces derniers affirment que plusieurs personnes étaient dans les champs, du coup, presque personne dans les domiciles. Ce qui fait que bon nombre de résidents n’ont pas leur nom sur les listes d’attributions. « Des bornes sont même dans le domicile de certains qui n’ont pas eu de parcelle. Et eux actuellement se demandent comment ils feront quand quelqu’un viendra les déloger pace qu’ils sont sur son terrain », nous confie un autre ressortissant de Mahon. Sans oublier des propriétaires des champs qui n’ont pas été attributaires non plus. Ces derniers se demandent donc sur quelle base la commission mise en place a fait les attributions. Une chose est sûre disent-ils, c’est que ce n’est pas ce sur quoi ils s’étaient entendus dès le départ.

De la confection des bornes…à l’attribution des parcelles…

Pour la confection des bornes, Saydou Traoré affirme qu’il a été demandé à chaque ressortissant désireux d’être attributaire de cotiser 3000 FCFA par personne. C’est ainsi, poursuit-il, que les populations ont adhéré et même des ressortissants du village résidant hors du pays ont versé le montant demandé. Avec la somme réunie, des bornes ont été confectionnées et avec ces bornes, 1200 parcelles ont été délimitées. Voyant que cela pourrait être insuffisant, dans la foulée, une seconde cotisation est lancée. Cette deuxième cotisation concerne cette fois-ci aussi bien les hommes que les femmes. D’autres bornes sont confectionnées et le nombre de parcelles est amené à 3000. Jusque-là la mairie de Kangala n’est mentionnée nulle part. Et c’est Nestor Traoré, ressortissant de Mahon résidant à Bobo qui précisera que la mairie n’est intervenue qu’au moment de l’attribution. En 2021, une liste des attributaires est donc dressée par la mairie après un recensement contesté par une partie de la population de Mahon. Et grosse surprise pour eux, de nombreux résidents en plus du chef du village qui étaient impliqués dans le projet dès le départ ne sont pas attributaires. Nestor Traoré lui, n’est pas surpris que son nom ne figure pas sur cette liste. Il dit qu’il n’a pas payé les 3000 FCFA demandés. « J’ai payé pour deux de mes enfants, pour mon épouse et pour ma mère », dit-il.

Des politiques pointés du doigt

Cette partie de la population contestataire en veut à des anciens dirigeants de la commune de Kangala. Celui qui est pointé du doigt aussi est le CVD du village de Mahon, Salifou Traoré. Il est accusé d’être à la base de tout ce ‘’désordre’’ autour de cette histoire de parcelles dans le village. De concert avec les politiques qui étaient à la tête de la mairie de Kangala, il est notamment accusé d’avoir introduit des noms fictifs lors du recensement, même ceux de certains qui ne sont plus de ce monde. Dans la foulée, cette population demande sa démission, vu que son mandat est arrivé à termes. Elle affirme par ailleurs qu’elle a entrepris des démarches auprès de certaines autorités de la région pour remédier à cette situation, mais sans suite.

Abdoul-Karim Etienne SANON