Communauté musulmane : les dessous d’une crise à plusieurs dimensions

Depuis le samedi 17 avril 2021, la communauté musulmane du Burkina Faso fait la Une des journaux et autres canaux de communication. Une crise qui dure depuis 2018.  Cette crise serait entretenue d’une part par deux parties adversaires qui composent la communauté et d’autre part, par des politiciens qui tirent des ficèles à l’ombre pour leurs intérêts personnels. Selon une source proche de l’organisation musulmane, la crise à plusieurs faces cachées.

Depuis le 6 juin 2020, le mandat de Rasmané Sana à la présidence de la Communauté musulmane est à terme. Il y a un vide au regard des textes qui régissent l’organisation de cette grande communauté au Burkina Faso. Car des élections consensuelles pour désigner le successeur du président sortant demeurent impossibles à cause du jeu à cache-cache. Les 27 et 28 octobre 2019, des fidèles venus de 33 sections provinciales ont choisi Omar Koanda comme le successeur de Rasmané Sana. Depuis cette date, deux bords bien tranchés se disputent la loyauté à la tête de la communauté musulmane du Burkina. Une lettre du ministère de l’Administration territoriale datée du 11 avril 2021 et adressée au bord d’Omar Koanda, autorise ce dernier et compagnie à prendre des dispositions pour la gestion des affaires courantes, y compris la grande mosquée de Ouagadougou.  Le samedi 17 avril 2021, alors qu’il devait être installé pour gérer une période transitoire, des partisans du camp adverse s’opposent.

L’implication des régions

Bobo-Dioulasso est un maillon essentiel dans le fonctionnement de la communauté musulmane. Malheureusement selon une source, l’ambiance n’est pas au beau fixe entre les dirigeants du grand Ouest avec Bobo-Dioulasso en tête. « Depuis la mort d’El Hadj Oumar Kanazoé, il n’y a plus y de visites officielles de délégations de la communauté à Bobo-Dioulasso. A chaque fois qu’il y a une délégation, seulement des gens sont désignés par affinité pour les recevoir. C’est de cette manière que des représentants provinciaux ou régionaux sont choisis sans une implication de tous quand il y a des rencontres. Le congrès de Bobo-Dioulasso en octobre 2019 pour élire Omar Koanda a été organisée de cette manière. Des participants ont été choisis dans des provinces, sans au préalable une implication de tous les acteurs. Depuis cette rencontre, la crise ne fait que s’accentuer… », confie-t-elle. La même source précise que, « l’actuel président de l’Ouest est aux affaires il y a plus de 25 ans. Il n’y a donc pas d’alternance. Et il n’y a plus de rencontres élargies. Il y a une sorte de sclérose au sommet. Par conséquent, la base est sans repère fiable », précise-t-elle.

La mainmise du politique

La communauté musulmane du Burkina Faso à l’instar des autres pays de la sous-région, fonctionne avec l’implication politique. C’est d’ailleurs ce qui explique la durée de la crise à laquelle on peine à trouver une solution. Selon notre interlocuteur, « le gouvernement peut mettre fin à cette crise en organisant des élections auxquelles les deux bords peuvent prendre part ; mais suivies par le gouvernement. Le vainqueur issu d’une telle élection sera le président incontestable. En confiant la gestion au groupe issu de la rencontre de Bobo-Dioulasso en 2019, il y a ici une prise de position », justifie-t-il. Selon lui, des ministres, des présidents d’institutions ont des positions prises vis-à-vis de la communauté. « Je taie volontiers des noms. Mais, il y a des autorités et non des moindres qui ne jurent que par la branche des Sunnites, certains celle des Ançars, d’autres ne défendent que les Ahamadias… Ils savent tous que la communauté musulmane constitue une force électorale », reconnait-il. Ces différentes facettes de la crise rendent difficile le retour d’une entente au sein de la communauté. Mais on peut se persuader que si le gouvernement s’implique sans arrière-pensée, des votes consensuels peuvent aboutir au choix d’un président pour tous.  Malheureusement…

Souro DAO