Contribuant de 15 à 20% au Produit intérieur brut (PIB), l’élevage est au moins pratiqué par 86% de la population active du Burkina. Autrefois exercé par l’ethnie Peule, l’élevage bovin concerne aujourd’hui toutes les ethnies du pays. Source de revenu de plusieurs familles, le secteur bovin traverse à ce jour des difficultés. La situation va grandissante compte de la hausse du prix du bœuf sur le marché national. Certains acteurs du secteur disent que, « Si rien n’est fait, le Burkina pourrait un jour importer des bœufs pour sa consommation ».
Eleveur et marchand, Alassane Diallo est inquiet quant à l’avenir du secteur bovin au Burkina Faso. « S’il y a une voie qui puisse permettre à un citoyen de prendre part aux conseils des ministres, je l’emprunterai pour interpeller le gouvernement », interroge-t-il. Bien conscient qu’il ne peut pas prendre part à un conseil des ministres, monsieur Diallo ne démord pas, quant à la transmission de son inquiétude à l’exécutif. Selon lui, l’heure est tellement grave, qu’il ne doit pas faillir à cette mission. Amidou Dicko, boucher à l’abattoir frigorifique de Bobo-Dioulasso corrobore les propos de son prédécesseur.
« Le bœuf est devenu très cher sur le marché au Burkina. Le prix moyen est à 150 000 FCFA et ce sont de petits bœufs. Pourquoi cela ? Pourtant l’élevage est un élément clé, sinon la base de l’économie nationale. La preuve en est que tout le monde est éleveur aujourd’hui, même des Bobos sont éleveurs. Pourquoi la viande va coûter si chère ? Même à 3000 FCFA le kilogramme, souvent le boucher ne s’en sort pas. A l’allure où vont les choses, nous allons acheter des bœufs dans la sous-région, à savoir, le Ghana, le Bénin, le Togo et la Côte-d’Ivoire ». Adama Bila soutient la même chose.
« Avant, des acteurs de la sous-région venaient se ravitailler chez nous au Burkina. La tendance est à l’inverse de nos jours. Car plusieurs acteurs burkinabè préfèrent aller à la frontière des pays limitrophes du Burkina pour espérer avoir des animaux moins chers ». Son propos est justifié par un acteur qui dit : « Rien que le dimanche 30 mai 2021, un ami m’a appelé de la frontière vers Gaoua, où il dit avoir acheté un bœuf à 125 000 FCFA. L’animal est déjà assez gros pour être dressé. Pourtant ici sur place, un animal à ce prix est trop jeune pour être dressé ?» Tous les témoignages faits, soutiennent qu’il y a une crise bovine au Faso.
Des raisons diverses
Depuis 6 ans, le Burkina est perpétuellement la cible des attaques terroristes. Le Sahel, zone d’élevage, est malheureusement beaucoup secoué par les attaques. Certains éleveurs ont vu leurs troupeaux enlevés de force, d’autres ont préféré partir. Cette situation a négativement affecté le secteur. Du coup, cela se fait sentir sur le marché. Dans certaines localités du grand ouest, des champs d’anacardiers ont pris beaucoup de superficies. Chaque planteur met à côté de son champ une fourrière. Chaque bœuf pris coûte 2500 FCFA à 5000 FCFA. Les prix varient selon les localités. « Il y a un manque criard d’aires de pâturage.
A ce manque d’espace, s’ajoutent les nombreuses fourrières. Beaucoup d’éleveurs ne tenant plus, ont préféré partir. Personnellement, j’ai une partie de mon troupeau qui a traversé la frontière. Nous souffrons de plus en plus dans l’exercice de notre travail », témoigne Alassane Diallo. Bila Adama explique la situation par le manque d’aires de pâturage aussi. « Le gouvernement a fait des réserves forestières sans tenir compte du grand nombre des éleveurs. Ailleurs, des forêts sont ouvertes aux éleveurs.
Ici, les forêts constituent des sources d’entrée d’argent pour le gouvernement par le biais des forestiers ». C’est pourquoi, Amidou Dicko interpelle le gouvernement, particulièrement le ministère des ressources animales à prendre à bras le corps la situation qui va de mal en pire. Interrogées aux marchés de Niénéta et de Bindougousso, des femmes dénoncent la hausse fulgurante du prix du kilogramme de viande. « Je pensais que la hausse était due à la fête de Ramadan. A ma grande surprise, les prix demeurent. 2500 FCFA les morceaux mixtes (ndlr : os plus la chair) et la chaire à 3000 FCFA.
Pour un pays où l’élevage est une activité phare, ce prix est assez élevé», soutient Madjara Cissé au marché de Niénéta. Quant à Elyse Sanogo : « Le prix de la viande arrange les vendeurs de poisson congelé venu de la Côte-d’Ivoire et la Chine. Avec 500 FCFA, sinon 300 FCFA, on nous sert du poisson. Combien de familles peuvent payer 2500 FCFA ou 3000 FCFA pour avoir la viande ? », interroge-t-elle. Toutes les personnes interrogées, soutiennent une hausse exagérée au niveau de la filière bovine
Souro DAO