« L’habitude est une seconde nature », dit-on. Alors Serges est veilleur de nuit dans un grand atelier de confection de divers objets depuis plusieurs années et a fini par aménager dans son lieu de travail pour y élire domicile. Toujours fréquent aux côtés de son employeur et assez disponible pour certaines courses de ce dernier. Serges est veuf et père de trois enfants depuis sa jeunesse et n’a plus voulu se remarier pour des raisons propres à lui.
Dans la journée au niveau de son service, il est totalement libre de tous ses mouvements et choisit par moments de côtoyer quelques clients de certains kiosques à café aux alentours de son lieu de travail. Par la force des choses, il commence à fréquenter les salles de jeux de hasard. Vite il devient adepte des lieux, car appâté par quelques gains de temps à autre. Finalement, Serges ne peut plus garder de jeton sur lui sans faire un tour pour tenter sa chance.
Devenu familier avec son patron qui a même placé sa confiance en lui, ce dernier confie toujours ses factures d’eau et d’électricité à Serges qui va les régler dans les guichets concernés. Il peut même accumuler des reçus de paiements de plusieurs mois avant de les remettre à son patron qui ne doute de rien puisque la confiance est installée entre eux.
Voilà un soir le patron de Serges en quête de monnaie pour désintéresser un client, remet un billet de dix milles francs à Serges pour lui trouver la monnaie. C’est aux environs de 15 heures qu’il est commissionné et jusqu’à 21 heures point de Serges qui reste malheureusement injoignable car il a éteint son téléphone portable. Las d’attendre, le patron rentre sans voir son envoyé qui n’a plus fait signe jusqu’au lendemain.
Pendant ce temps, Serges a pris l’argent et continué tout droit dans la salle de jeux, non pas pour demander la monnaie mais pour jouer dans l’espoir de gagner plus d’argent avant de revenir à son poste de travail. Mais que nenni ! Au lieu de gagner, Serges fini de jouer tous les dix milles et commence à voir rouge. Que faire ? Le voilà dans le magasin d’un de ses amis à qui il s’adresse en ces termes après les salutations d’usage : «Mon frère et ami, je jure sur la tombe de mon père, si tu ne trouves pas 10 000 francs pour cette nuit-là je suis foutu. La maman vient de m’appeler du village tout de suite pour une urgence et je ne compte que sur toi». L’ayant cru et malgré sa bonne volonté, cet ami n’a pu trouver que 5000 francs pour lui, car il vient d’engager une dépense juste avant son arrivée.
Serges ne trouve pas d’inconvénient et prend les 5000 francs. Il quitte son ami et se dirige directement dans la salle de jeux pour bousiller aussi ces 5000 francs sans rien avoir encore. Bien que c’est la période du froid et les salles de jeux sont bien conditionnées, Serges coule de grosses gouttes de sueur. Dans sa persévérance, il prend son courage à deux mains et va taper à la porte de son grand frère, un commerçant qui est étonné de la présence nuitamment de son frère chez lui surtout avec la distance qui sépare leurs lieux de résidence. Devant son frère, sa version : «Je dois quinze milles francs à quelqu’un qui menace de m’enfermer la nuit-là si je ne lui rembourse pas son dû. Comme je n’ai que toi sur qui je peux compter, c’est pourquoi je suis là ».
Son grand frère propose de l’accompagner chez son créancier pour négocier, mais il refuse. Il lui faut nécessairement l’argent. La fibre fraternelle aidant, ce dernier lui remet la somme demandée. Il le remercie et refuse même de manger et rassure son frère d’aller rembourser le crédit. De chez son grand frère, direction la salle de jeux comme s’il avait été hanté de jouer forcément. La suite pour la semaine prochaine.
Siaka SANON