Jusqu’où ira le jeu démocratique de nos présidents ?

Qui de l’Ivoirien Alassane Dramane Ouattara et du Guinéen Alpha Condé incarne le mieux la nouvelle tendance des chefs d’États africains à prendre tout leur temps au pouvoir ? Les deux ont ceci de commun qu’ils ont atteint l’âge d’une raisonnable retraite bien méritée, qu’ils sont classés parmi les plus diplômés des présidents africains en exercice. Mieux, ils sont passés par une certaine traversée de désert avant d’accéder à la magistrature suprême. Ils sont surtout connus dans la période post électorale actuelle comme ceux qui ont réussit à imposer un troisième mandat pour eux, face à des oppositions populaires qui se sont soldées par quelques morts ici et la ! Ils ont trouvé les arguments et les moyens pour échapper au respect de cette limitation des mandats présidentielles à deux ans telle que c’est écrit dans la plupart des constitutions africaines et pratiquée dans la plupart des nations modernes à travers le monde. Mais pour eux et leurs partisans, c’est ADO la solution pour la Côte-D’ivoire et pour les ivoiriens, et c’est Alpha Condé le meilleur des choix possibles en Guinée. Sauf que cela a quelque chose de naïf comme raisonnement, étant donné que Alassane et Alpha ne seront pas toujours là pour les ivoiriens et les guinéens. Que deviendront alors leur pays lorsqu’ils ne seront plus là comme guides providentiels ? N’est-il pas aussi naïf de penser que nous devrions faire notre démocratie comme bon nous semble en tant qu’africains parce que soit disant le contexte sociopolitique justifierait une certaine entorse aux principes démocratiques tels la limitation de mandats à deux ? On a envie d’abonder dans ce sens au nom d’une certaine stabilité, sauf que là aussi, l’argument pêche par son caractère presque insultant pour les pays et les populations concernées. L’homme qui fait problème et dont le maintient au pouvoir fait des morts serait-il l’unique gage de paix et de stabilité dans son pays ? La qualité de l’homme en tant qu’individu et même en tant chef d’État n’est pas ici remis en cause, mais on déplace le débat ou l’on pose mal le problème en termes d’individu aussi méritant soit-il ! Nul ne niera à Alassane Dramane Ouattara son immense apport au progrès de son pays et son mérite à être chef d’État en Côte d’Ivoire. Mais ce qu’on attend en supplément, c’est que ses succès impliquent aussi qu’il puisse préparer sa succession dans les délais de sorte à assurer une continuité constitutionnelle basée sur la Cote d’Ivoire globale dans toutes ses composantes et ses lois fondamentales. Que la machine Côte d’Ivoire soit bien huilée pour fonctionner bien avec ou sans Alassane Dramane Ouattara en Côte d’Ivoire ou Alpha Condé en Guinée. Cela revient à donner force à la légalité et la norme de fonctionnement d’un Etat africain moderne, réellement remis sur les rails avec toute la rigueur qu’il faut. Ce génie politique qui fera le salut en Afrique au plan du développement politico-économique et de la gouvernance pour un progrès socio économique attend toujours ses grosses têtes et ses génies au pouvoir. En attendant, on assiste au jeu des grands entre politiciens, ou les meilleurs l’emportent sur l’échiquier ou le damier politique ! Le gagnant se faisant applaudir par ses pairs à travers des cérémonies d’investitures où on jure sur des constitutions susceptibles d’être modifiées à tout moment. De sorte que celui qui a juré dessus ne se sentira pas coupable d’en violer, un terme sacré qu’il aura pris soin de modifier entre temps, comme des époux qui se débarrassent de leurs alliances pour trahir leurs conjoints et leurs vœux de mariage, sans remords !

Sibiri SANOU