Poste frontière Niangoloko- poste frontière juxtaposé Cinkansé : Jugeons le plus économiquement rentable

Pour mieux réguler le transit avec les pays voisins, chaque pays a mis en place des postes de contrôle. Qui sont devenus des centres d’entrée de devises pour les économies nationales. Ce sont des milliards de F CFA que font rentrer ces postes au budget de l’État à travers le paiement de taxes et autres impôts. Pour permettre aux Etats de mieux gérer cette source de devises, et aux usagers de gagner en temps, l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA) a installé des postes de contrôle juxtaposées. En expérimentation à la frontière entre le Burkina Faso et le Togo, le poste juxtaposé de Cinkancé est-il plus économiquement rentable que les postes de Douanes classiques, notamment celui de Niangoloko ? La réponse dans les lignes qui suivent après un séjour à Cinkancé et à Niangoloko.

Lieu de transit d’un pays à un autre, les postes frontières mobilisent d’importantes ressources pour le pays. Pour une bonne gestion, l’Organisation mondiale du commerce (OMC) par le biais de l’UEMOA a mis en place des postes de contrôle juxtaposées.  L’objectif est de réduire le temps de traitement des dossiers par la facilitation des formalités administratives et douanières. Pour cela, a dit Richard Bayala adjoint du chef de bureau de Douane de Cinkansé, «les administrations du Burkina Faso et du Togo sont regroupés au sein de ce poste juxtaposé». Selon ce dernier, «on retrouve plusieurs services comme la Douane, le Conseil Burkinabè des Chargeurs, la Chambre de Commerce et d’Industrie du Burkina Faso, les services vétérinaires, les services phytosanitaires, la Police et les Eaux et forêts». Tous ces services interviennent dans le traitement des marchandises. Cependant, pour l’adjoint du chef de poste de Douane de Cinkansé, «il y a des difficultés qui ne permettent pas d’atteindre l’objectif visé à savoir la réduction du temps mis pour le transit». A l’en croire, «la partie togolaise est responsable de cette perte de temps».

En effet, un véhicule qui entre au poste juxtaposé devrait ressortir en une demi-journée avec toutes les formalités faites par les deux pays. Malheureusement, la Douane burkinabé est obligée d’attendre que son homologue du Togo finisse de traiter les dossiers avant que le dossier n’arrive à son niveau. «Avec la situation au Togo, le poste juxtaposé fonctionne à moitié. Le pays d’entrée ne peut pas traiter les véhicules ou les marchandises tant que le pays de sortie n’a pas fini les formalités», explique Richard Bayala. Comment ça se passe. Lorsqu’une marchandise quitte le parc au Togo, c’est la Douane togolaise qui fait les formalités de sortie et les transmet à la Douane burkinabé. Ce qui prend beaucoup de temps. Un autre véritable problème au niveau de ce poste juxtaposé qui cause le retard, ce sont les horaires de travail. Alors que la Douane burkinabé travaille de 6h30 à 19h souvent jusqu’à 22h, au Togo, c’est de 8h à 12h30 et de 15h à 17h 30 qu’on travaille. Ce qui «déjuxtapose» le travail. Malgré tout, pour Richard Bayala, « le poste juxtaposé est la bienvenue car il regroupe tous les services ». Si la marchandise concernée par le contrôle est un produit de consommation (le cas des huiles par exemple), il faut que le service phytosanitaire donne son accord qu’il est propre à la consommation avant que les formalités ne soient faites.

Ce qu’il faut payer au poste juxtaposé

Au niveau du poste juxtaposé, du côté du Burkina Faso, l’entrée des marchandises est soumise à une redevance informatique de 10 000 FCFA par déclaration ; en plus 0,25% de la valeur de la marchandise est reversé à la Chambre de Commerce et d’Industrie. Selon l’adjoint du chef de poste de Douane de Cinkansé, il y a certaines marchandises sensibles qui ont besoin d’escorte. Les frais d’escorte font 5 000 FCFA par véhicule jusqu’à Ouagadougou. Le poste juxtaposé est bien rentable sur le plan financier et en plus, il devait permet de gagner en temps. «A notre niveau, explique encore Richard Bayala, ce sont les petits dédouanements. Nous mobilisons des recettes d’environ 6 milliards par an. C’est insignifiant par rapport à Ouaga inter qui tourne autour de 14 milliards FCFA par mois et 200 milliards FCFA par an». Ce sont au 500 dossiers de véhicules qui sont traités par jour à ce poste juxtaposé où sont installées au moins 250 maisons de transit.

Au poste juxtaposé de Cinkansé, il n’y a pas que les services de dédouanement. Les marchandises sensibles passent d’abord au niveau du service phytosanitaire dont le quitus est indispensable pour que la marchandise soit traitée par la Douane. Car il faut se rassurer de la qualité et de la normalité de la marchandise. Il y a aussi les services des Eaux et forêts qui traitent les dossiers des sachets plastiques et tout autre produit relevant de leurs compétences.

Les transitaires et le poste juxtaposé de Cinkansé

Au poste juxtaposé de Cinkansé, les transitaires sont organisés en association, dirigée par Zampaligré Tasséré dit Tahirou. Ce dernier a égrené les difficultés qu’ils rencontrent. «Au départ, indiquera-t-il, on nous a fait savoir que le poste juxtaposé allait être géré par l’UEMOA. Aussi, on nous a dit que les camions allaient faire au maximum 30 mn et ressortir mais finalement des camions peuvent faire deux jours». En plus il y a le problème de balises. «Souvent, confie Zampaligré Tasséré dit Tahirou, on nous parle de problème de connexion que nous ne comprenons pas du tout».

Au poste frontière de Niangoloko

A 45 kilomètres de Banfora, sur la route N°1 se trouve la ville Niangoloko, la dernière grande ville avant la frontière avec la Côte d’Ivoire. C’est dans cette ville que se trouve le poste frontalier avec ce pays. Tout comme au niveau des autres frontières traditionnelles, on y retrouve plusieurs services à savoir le service phytosanitaire et de la qualité des produits, le poste du Conseil Burkinabè des Chargeurs, le poste de Douane. Ousmane Traoré est le chef de poste du service phytosanitaire et de la qualité de Niangoloko depuis quelques années. Son service travaille aux côtés des services de la Douane. Il est chargé de la vérification des normes et du contrôle qualité des produits à l’importation ou à l’exportation, et même en transit. Le contrôle concerne les produits végétaux transformés ou non, le sel, l’engrais et aussi les pesticides. Tout produit à l’importation, à l’exportation et en transit doit avoir une documentation. Les produits soumis au contrôle phytosanitaire doivent avoir un certificat émis par la Douane du pays exportateur. Ce document permet de renseigner sur l’état sanitaire et phytosanitaire du produit. Selon Ousmane Traoré, «s’il n’y a pas de certificat phytosanitaire le produit doit être saisi. Si c’est un produit de grande consommation, le chef de poste phytosanitaire informe sa direction qui se renseigne auprès du pays d’origine pour lever tout équivoque le concernant».

Le contrôle phytosanitaire n’est pas que documentaire, il est aussi physique et principalement visuel. Aussi, en cas de suspicion des prélèvements sont faits pour examen. S’il n’y a pas de doute un procès-verbal d’inspection phytosanitaire est établi moyennant un montant en fonction du poids du produit. De l’avis de Ousmane Traoré, « le bois et ses dérivés ainsi que les produits manufacturés n’ont pas les mêmes tarifications ». Les tarifications sont fixées par arrêté interministériel. Le chef de poste phytosanitaire de Niangoloko déclare que son service fait entrer au budget de l’Etat tout au plus 70 millions FCFA par an. Il précisera tout de même que l’objectif premier n’est pas de faire rentrer de l’argent. Pour Ousmane Traoré, la principale difficulté au niveau du poste phytosanitaire de Niangoloko c’est le refus de certains acteurs notamment des transitaires de se soumettre aux contrôles. Aussi, conclut-il, «il arrive que des produits quittent le poste frontalier sans être contrôlés».

Les chargeurs y sont présents

Le Conseil Burkinabè des Chargeurs est aussi présent au poste frontière de Niangoloko. Hermann Doulkoum en est le chef de poste. Son rôle est d’émettre les documents à l’image de la lettre de voiture qui accompagne les chauffeurs. La lettre de voiture qui était avant un simple document est devenue plusieurs documents composés du Bordereau de suivi du trafic routier (BSTR) qui détermine le suivi de la marchandise jusqu’au point de dédouanement. En plus, il y a le Bordereau de suivi du trafic en transit (BSTT). Ce document est destiné aux marchandises qui sont en transit dans notre pays. Puis il y a le Bordereau de suivi des véhicules à MU surtout non-dédouanée (BSVM), et le Bordereau électronique de suivi des cargaisons qui est émis depuis l’Europe. Toutes ces prestations ont un coût, mais variable.

Les comptes des commissionnaires en douane

Le rôle des commissionnaires en douane ou encore les transitaires au niveau du poste frontière est de faciliter les opérations de Douane. Au poste frontière de Niangoloko, ils sont organisés dans une association qu’est l’Amicale des transitaires de Niangoloko dont la mission est de défendre les intérêts de leurs membres. L’adhésion qui coûte 5 000 F CFA par maison est volontaire ; la cotisation est de 1000 F CFA pour les chefs d’agences et 500 F CFA pour les agents. Ousséni Diallo dit Morgan est le président de cette Amicale. Pour lui, «on ne peut pas dire que l’activité de commissionnaire en douane n’est pas rentable. Seulement avec l’interconnexion, la rentabilité a beaucoup baissé». Car, poursuit-il : «avant l’interconnexion, on faisait les déclarations sur place mais maintenant les déclarations sont faites depuis Abidjan». Rufin Adama Coulibaly, secrétaire général de l’Amicale renseigne qu’il y a exactement 103 maisons de transit au poste frontière de Niangoloko.

Dans une opération de dédouanement le transitaire facture sa prestation au commerçant. Les prix des prestations varient d’une maison à une autre. «En principe, fait savoir Rufin Adams Coulibaly, il y a un barème de facturation qui malheureusement n’est pas appliqué». Le plus souvent, il est calculé en fonction de la quantité de la marchandise. Et est compris entre 22 500 FCFA et 32 500 FCFA en fonction des sociétés. «Mais, avec la multitude de maisons de transit, il est difficile d’organiser la facturation», conclut-il.

En plus de l’interconnexion qui a fait baisser leurs activités, les transitaires de Niangoloko mentionnent la suppression de l’Unité banalisée de dédouanement (UBD), comme une autre difficulté. L’UBD permettait aux transitaires de saisir et d’imprimer des déclarations au niveau de la Douane. Avec sa suppression, chaque transitaire se débrouille pour saisir et imprimer ses déclarations.

L’impact économique de la frontière sur la ville de Niangoloko

Selon le maire Héma Bassihé, «Niangoloko mérite son statut de commune urbaine à cause de cette frontière». La commune bénéficiait à son arrivée, grâce à une bonne politique de marketing, de 70 à 75 millions FCFA par an. Avant la fermeture des frontières, ce montant était passé à plus de 100 millions FCFA par an. «Mais depuis la fermeture des frontières, nous sommes restés deux ans et quelques mois sans recettes», se plaint le maire Héma.  «Ce sont seulement 12 millions de FCFA que la frontière a pu générer pour la commune aux dernières nouvelles», nous explique-t-il. Ce qui veut dire que la fermeture des frontières a fait perdre à la commune de Niangoloko près de 80 millions de FCFA par an et cela durant deux ans.

Le poste de Douane de Niangoloko c’est plus du milliard de recettes par an

A Niangoloko, au poste de Douane le chef Hamado Bamogo et ses hommes abattent un travail formidable pour contribuer au budget de l’État.  Il consiste à faire transiter les marchandises vers les bureaux internes ou les bureaux de sortie. La Douane de Niangoloko relève du bureau de Douane de Bobo-Dioulasso du fait que le découpage de la Douane n’est pas en fonction du découpage territorial. Le poste de Niangoloko dédouane aussi les marchandises pour la mise en consommation. Et les systèmes douaniers sont informatisés. «Si le transit est levé depuis la Côte d’Ivoire nous notifions simplement le passage et le véhicule continue», a indiqué le chef de poste Hamado Bamogo. Lorsqu’un véhicule arrive au niveau du poste, ils s’assurent qu’il a ces documents à jour.  Car la circulation des véhicules étrangers sur notre territoire obéit à une réglementation. Il doit avoir un laissez-passer qui est payant. Pour les véhicules touristiques il coûte 5 000 FCFA et 1 000 F CFA pour le laissez-passer rose et les véhicules personnels. Ce sont toutes ces activités qui permettent au poste de Douane de Niangoloko de participer au budget de l’État.

En 2020 sur une prévision de 1,825 milliard de FCFA, le poste de Douane de Niangoloko a contribué au budget de l’État à hauteur de 1 842 104 161 F CFA. Pour l’année 2021, la prévision budgétaire pour ce poste est de 2 143 208 044 FCFA. Chef de poste de Douane à Niangoloko, depuis deux, les résultats montrent l’excellent travail de Hamado Bamogo et ses hommes.

Le poste vétérinaire de Niangoloko a déjà mobilisé 15 300 000 FCFA en 2021

Les services vétérinaires sont bien présents au poste frontière de Niangoloko. Ils ont un bâtiment propre à eux et l’équipe est dirigée par Denis Kaboré. Selon ce dernier ils sont chargés de contrôler tout ce qui est produit animal ou d’origine animal mais aussi les intrants entrant dans l’alimentation animal ou des produits à usage vétérinaire. Ce poste se relève de la perception spécialisée du ministère des Ressources animales. Pour ce qui concerne les animaux qui sortent du pays, ils doivent disposer d’un document sanitaire. Au vu de ce document, les services vétérinaires leur délivrent un certificat sanitaire qui les accompagne hors du pays. Ce certificat sanitaire ou certificat vétérinaire international coûte 1000 FCFA pour un aller. En plus de cela il faut payer le poste de régie qui est une taxe catégorisée de 3000 F CFA pour les bovins, les équins, les asins et les camelins ; par tête pour les animaux de compagnie de 1 à 10 et 2000 F CFA pour les ovins de 1 à 30, par tête pour la faune sauvage et gibier d’élevage et 1000 F CFA de 1 à 10 pour les lapins, de 1 à 500 pour les poussins et par unité pour les trophées de chasse.

Dans l’exercice de ses fonctions, il arrive que le service vétérinaire refoule des produits à la frontière. Ainsi, Denis Kaboré indique que depuis qu’il est à ce poste il y a un an de cela ils ont déjà refoulé des poussins de 1 jour en provenance de la Côte d’Ivoire et du foie de bovin. En 2020, le poste vétérinaire de Niangoloko a contribué au budget de l’Etat à hauteur de 20 millions de F CFA. Cette année pour un objectif fixé à 15 300 000 F CFA, 16 millions de FCFA ont déjà été collectés avant la fin de l’année soit un taux de 104 %.

Cependant, indique Denis Kaboré, «le poste fait face à beaucoup de difficultés. Des produits sortent ou entrent sans passer par le poste». C’est pourquoi il demande une franche collaboration avec les services des Douanes. Il va plus loin en proposant même que les services au poste frontière de Niangoloko tiennent trimestriellement une rencontre pour permettre une meilleure coordination des activités.

Firmin OUATTARA

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